Je me suis assise au soleil sous une glycine. Au début, je trouvais le moment paisible. Dans ces temps confinés, il arrive que parfois on traîne le regard, chaque élément du mini-paysage sous les yeux à détailler, un à un, l’herbe, le voisin n’a planté que des tulipes dans son jardin, les volets marrons mal assortis avec la maison n°42, plusieurs 4×4 noirs garés, c’est joli un figuier au début de sa floraison ça a quelque chose de japonais, tiens il y a une mangeoire cachée au milieu des buissons, le portail mal fermé, Attention chien bizarre écrit sur la pancarte, la pie sur l’antenne et l’autre la rejoint, le crépi jaune vif de la façade, un chardon qui pousse contre un mur, la poubelle de travers sur le trottoir.
J’imaginais que la vie était en train de devenir tranquille.
Comme ça, de confinement en confinement, le volume sonore de la ville allait s’éteindre, l’atmosphère lente de cette rue comme un jour d’été de canicule quand personne ne sort de chez soi, mais plus encore.
Ce silence de nos journées sans l’activité, sans les trajets, sans les moteurs, pas un klaxon pas un cri, sans le brouhaha des conversations.
Tout semble anodin et immense à la fois.
Et on dirait que le monde chuchote.
Et puis, j’ai réalisé qu’en réalité ça bourdonnait, à mes pieds des insectes s’agitaient, s’affairaient. Là-haut, les bourdons à fond dans les grappes violettes, par-terre les fourmis dans un sens, avec leurs brindilles sur la tête, dans un autre avec des miettes, des araignées, des lézards, des va-et-vient comme un vaste chantier, une impression d’usine, de travail. Une course folle. La nature, tout à son printemps, emportée dans son élan.
Alors que moi, comme disait mon père en me conseillant d’arrêter : je gobe les mouches.
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