RDV pour une rencontre avec Dominique Sigaud : vendredi 9 octobre à 18h30 Bibliothèque Mériadeck Bordeaux.
C’est la troisième semaine du Projet Une chambre à écrire. L’auteure, l’écrivain, la femme qui s’installe dans la chambre pour sa résidence bordelaise est Dominique Sigaud.
J’ai découvert sa littérature, sa « langue » elle dit souvent, grâce à Sophie Robin du Collectif Jesuisnoirdemonde, initiatrice de cette drôle d’aventure promenades-rencontres-littérature… Le premier livre lu Partir, Calcutta chez Verdier, j’en parlais dans l’une des dernières déambulations écrites dans le magazine Junkpage, celle publiée en février.
« Étrangement, tous mes projets
futurs d’écriture nécessitaient des promenades : le mot « parcours » comme un karma indépassable. Pour l’un d’eux, il y avait ce livre posé sur mon bureau. Que je lisais par bribes, délicatement, avec des respirations entre les pages, à cause de l’effet qu’il me faisait, reprendre le souffle et avancer doucement, on a des vertiges quelquefois quand on lit.
Le titre avec le mouvement encore : Partir, Calcutta.
« Ça danse enfin. Ça danse autour de moi, je peux me mettre en mouvement.
Je mets un pied devant l’autre, je marche, je n’arrêterai plus. Je laisse de côté la masse, je bouge dans ce qui bouge autour de moi. C’est Calcutta enfin, un rythme, une pulsation ; géographie inconnue, territoire sonore. »
Et puis, juste plus tard, alors que
je finissais à peine de rédiger ce texte, Charlie Hebdo a été assassiné. La sidération. Et puis l’obscurité.
Après, pour un peu de fraternité, j’ai marché avec vous autres.
Bancale. »
C’est le premier moment. Quand on découvre une écriture et que ça s’ouvre en soi.
Dominique Sigaud le décrit cet instant de rencontre magistrale dans Tendres rumeurs, son dernier livre aux Éditions du Sonneur :
« Lire m’a recousue, bordée, aimée, défendue, élevée, entourée. Je ne dépasse pas la première page si cela ne me convient pas. J’entends qu’on fasse pareil avec ma langue. Que ma langue aussi puisse en recoudre certains je le sais ; que certains ne la supportent pas, aussi. Entrer dans une langue que je découvre et aime aussitôt est un des bonheurs les plus subtils et nourriciers que je connaisse. »
Je lisais Partir, Calcutta, et dès les premières lignes je suis recousue… avec elle, avec moi, et Duras en lien de couture.
Puis, j’ai lu Blue Moon. Sur la plage, alors que ça n’est pas du tout un livre de plage. On assiste à l’exécution – et aux pensées – d’un jeune afro-américain qui a violé et tué une jeune femme blanche. On est dans chaque instant de la vie du jeune homme (c’est juste un crétin au départ… elle dit. Et la violence arrive là, à cause de ça, d’un crétin qui veut exister, qui veut aller au bout d’un désir et son crime est terrible et son exécution est terrible).
Et puis m’arrive entre les mains : Tendres rumeurs. Un texte écrit à partir d’une phrase qu’on lui propose : Ce que la vie signifie pour moi.
Elle raconte comment cette phrase n’a aucun sens d’abord, puis en quelques jours et même quelques heures, elle apprend la mort de sa mère, la tuerie de Charlie Hebdo, son cancer. Elle continue d’écrire. La phrase initiale a gonflé soudain, comme un fleuve.
« Je pense au Gange de Calcutta me renvoyant la question : Que fais-tu de ta propre envergure ? Question terrible. »
D’autres livres à lire d’elle : j’ai commencé De chape et de plomb. Sur la pile à lire (mais on doit laisser du temps entre chaque) : The dark side of the moon. Elle a eu le prix Gironde avec L’hypothèse du désert, paru en 1996 chez Gallimard.
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